- Les Pygmées de BITOUGA -

- Création de la Page : Mai 2014

• Une rencontre avec une civilisation très ancienne, complètement immergée dans la forêt équatoriale. Les pygmées connaissent parfaitement la forêt avec ses pièges et ses bienfaits. Un immense privilège de voir et de toucher un monde différent.

Hutte Traditionnelle Pygmée au Village de BITOUGA :

BITOUGA-le-Village-Hutte-Tradiotionnelle-Pygmee-Habitee-14E5K3IMG_98100wtmk-Web

En Pirogue sur la NTEM :

BITOUGA-le-Retour-le-Fleuve-Ntem-le-Piroguier-14E5K3IMG_98547wtmk-Web


Carte de Situation du Village de BITOUGA :

Carte-Gabon-Bitouga-01-Web


Carte de la Marche au Village de BITOUGA :

Carte Marche Bitouga C-Web-01


- Le Matériel Photo :

• Toutes les photos ont été réalisées avec le matériel suivant :
---- Appareil CANON EOS 5D MK III avec zoom CANON 28/300 mm F3,5-5,6L IS USM ou zoom CANON 24/70 mm F2,8.
---- Les macros ont été faites soit avec un appareil CANON EOS 50D, soit avec l’appareil CANON EOS 5D MK III, avec les objectifs CANON 100 mm F4 IS Macro USM et 65 mm MP-E F2,8 1-5x.
---- Flash CANON Speedlite 580 EX II

Bouton Bleu Photos Fleuve Ntem 470x52


Bouton Bleu Photos Pygmées Bitouga 470x52


- Le Trajet ALLER :
• Stéphane et moi-même, allons démarrer le matin, pour notre parcours vers le village de BITOUGA, au nord-est du pays, dans l'extrême nord-est de la province du Woleu-Ntem. Nous allons faire le voyage avec son Toyota BZJ 78, aménagé confortablement.

De Libreville, nous avons pris la route passant par Kango / Bifoun / Ndjolé / Lalara / Mitzic / Oyem / Minvoul. De Libreville jusqu'à Bitam (donc au carrefour vers Minvoul), la route est entièrement goudronnée et ne présente donc aucune difficulté.
•• 
LIBREVILLE -> Ndjolé : 245 km, soit environ 5h de voiture.
••• Ndjolé -> Oyem : 290 km, environ 5h de voiture avec les arrêts.
••• Oyem -> Carrefour vers MINVOUL : 18 km.
•••• Carrefour vers Minvoul (après Oyem) ->
MINVOUL : 97 km, environ 2h45.

BITOUGA-Debarcadere-Rangement-Materiel-par-Stephane-et-JLA-14E5K3IMG_97882wtmk-web
Pour l'aller, nous avons donc pris la route goudronnée jusqu'à Oyem, qui est sans aucune difficulté et après Oyem, on quitte la route goudronnée pour prendre la piste qui va directement à MINVOUL, qu'on atteint après une centaine de kilomètres. Cette piste est très correcte en 2014, mais son état peut varier au cours du temps et des réhabilitations. Nous l'avons faite de nuit, car nous avons quitté Oyem, très tard dans l'après-midi. Dès les premiers kilomètres, nous avons dû mettre les phares. Sans excès de vitesse.

Le trajet aller fait environ
650 km au total, de Libreville à Minvoul, en prenant la piste après Oyem, et il faut environ 13h30 de conduite, avec un véhicule 4x4. Avec un véhicule de tourisme, la partie goudronnée peut être faite plus rapidement, mais après, il y a de la piste sur 100 km.


- La Marche :
Sortie ville MINVOUL (Case de Antony) -> Débarcadère de Départ : Environ 3,2 km de marche.
•• Trajet en pirogue (entre les 2 débarcadères) : Environ 1,2 km, soit 30 à 35 minutes de navigation.
•• Débarcadère Arrivée ->
Village de BITOUGA : 5 à 6 ou 700 m de marche, environ 15 à 20 minutes.


Bitouga-le-Retour-la-Riviere-Ntem-Navigation-Antony-et-JLA-SB14DSC1003078wtmk-Web
- Le Trajet RETOUR :
• De MINVOUL, nous avons pris la piste qui va à BITAM, en longeant la frontière camerounaise.
•• Minvoul -> Carrefour vers Oyem : 9 km, 20 minutes de conduite).
•• 
MINVOUL -> BITAM : 113 km, soit 2h15' de conduite environ. De Minvoul, on atteint après 9km, le carrefour qui va à Oyem, si on prend la piste vers le sud, ou vers Bitam, si on continue plein ouest.
••• Bitam -> OYEM : 73 km, environ 1h20' de conduite.
En passant par BITAM, le trajet est
rallongé de 70 km, et on met environ 1heure de plus.

••• OYEM -> SAM : 107 km, environ 2h40' de conduite. Après Oyem, on arrive après 25km, au village de BIBAS. C'est à cet endroit que se trouve le carrefour qui permet d'aller à Mitzic, en prenant plein sud, ou vers SAM, en prenant plein ouest. C'est à partir de là que commence la piste vers SAM.
••• Sam -> Médouneu : 71 km, 1h30 de conduite.
••• Médouneu -> KOUGOULEU : 161 km, 4h40 de trajet. Nous avons commencé cette piste à la tombé de la nuit, dès que nous sommes sortis de Médouneu. Sans faire d'excès sur une piste relativement facile. Par contre, la première heure, sur environ une soixantaine de kilomètres, même si la piste ne présente aucun difficulté, le revêtement a disparu en laissant apparaitre les cailloux. Cette portion est donc infernale pour la mécanique qui souffre. Puis, plus loin, ça s'améliore.

A environ 30 km de Médouneu, au détours d'un virage,
2 éléphants apparaissent dans la lueur des phares. 2 grandes masses sombres qui émergent de l'ombre. Ils s'affolent et essaient de partir. Mais sur notre droite, la pente est abrupte, quasi verticale sur plus de 5 mètres. La piste a été taillée à flanc de colline et la falaise de terre à droite n'offre aucune issue. Les éléphants cherchent uns solution. Sur notre droite, aucune échappatoire. Puis ils viennent vers nous. On est à plus de 30 mètres, et on observe. Ils sont réellement agités. Puis, ayant avancé de quelques mètres vers nous, ils plongent sur notre gauche, à travers les arbres. Finalement, au bout d'une trentaine de secondes, ils disparaissent définitivement. Vision inattendue et toujours magique de ces animaux. Un peu avant, à la nuit tombante, ne pensant plus avoir besoin de mon appareil photo, je l'ai rangé dans son sac. Belle déception. Même de nuit, j'aurais pu faire une photo à haute sensibilité, juste pour le témoignage. Ils ne seront donc pas figé, mais ils resteront gravés dans ma mémoire, et celle de Stéphane.

Lorsque le pont de Kango s'est effondré en fin 2012, cette piste a été nivelée et entretenue pour permettre le passage des véhicules vers Oyem et le nord. Puis, après la réparation du pont, cette même piste a été laissée à l'abandon. Elle s'est fortement dégradée avec le temps. Aujourd'hui, même si elle est praticable, au 3/4 du trajet vers la civilisation, il y a 5 ponts successifs qui se sont effondré. Les engins ont donc creusé des déviations qui évitent ces ponts fragilisés et impraticables. Les véhicules passent donc aujourd'hui par les rivières successives. La chance veut que le lit des rivières soit peu profond, sauf en cas d'orage, et surtout, qu'il n'y ait pas de vase, mais du caillou. Il est évident que les abords des rivières sont défoncés, et mieux vaut avoir un véhicule 4x4 pour passer sans difficulté.

BITOUGA-le-Village-le-Retour-14E5K3IMG_98444wtmk-web
Nous, nous avons fait ce trajet de nuit. On a donc été un peu désorienté en arrivant sur un premier pont, à environ 100 km de Médouneu (2h de route), sur lequel, le tablier était complètement défoncé. Heureusement nous ne roulions pas très vite et en apercevant l'état du pont, nous nous sommes arrêtés. En descendant on s'est éclairé par les phares pour voir son état. Le doute n'est pas permis, la plupart des planches sont absentes, et il y a des énormes trous au milieu des gros troncs qui assurent la rigidité de l'ensemble. En arrivant à la jonction piste / pont, je m'aperçois qu'à travers les planches absentes, j'éclaire l'eau, à plus de 3 mètres de profondeur. En fouillant un peu plus à l'aide ma lampe frontale puissante, je constate également, que l'un des troncs qui sert de poutre de soutien, est cassé et une partie plonge dans l'eau. Ce serait de la folie de passer dessus. Je garde en mémoire, qu'au dernier contrôle, un agent m'a dit qu'il y avait quelques problèmes sur un pont, et qu'il faudrait peut-être passer dans l'eau. Sur le moment, je n'avais pas très bien compris ce qu'il avait voulu dire. Maintenant, je comprends parfaitement. On fait donc le tour, en pleine nuit et en s'éclairant de ma lampe. On lance le faisceau lumineux devant puis sur la droite et la gauche. Sur le côté droit, on aperçoit, une pente qui a été façonnée par un engin de TP. Une déviation part de la piste et plonge dans le cours d'eau. Du pont on ausculte les 5 mètres à faire, puis le lit de la rivière, où on voit un tapis de gravier et cailloux. Ensuite, la remontée de l'autre côté ne semble pas présenter de problème. On décide donc de passer par l'eau. Malmenés par les creux et les ondulations de la boue légèrement séchée, on passe dans l'eau. L'eau n'est pas très profonde et monte jusqu'à environ mi-roue. J'éclaire au passage le pont qui montre le tronc cassé dont les 2 côtés tombent dans l'eau. C'est clair, le pont est inutilisable, et la solution est celle que nous sommes en train de mettre en application. La remontée de l'autre côté nous permet de rejoindre la piste.

Sur quelques kilomètres, on croisera successivement 5 ponts détruits et donc 5 ouvertures de déviation par l'eau. Il est certain, que sans un véhicule tout-terrain, il est fortement déconseillé de prendre cette piste, dans l'état où elle est. Sera-t-elle réparée un

••• Kougouleu -> Libreville : une soixantaine de kilomètres environ. Un peu plus d'une heure de route. A Kougouleu, on rejoint le goudron, qu'on ne quittera plus jusqu'à Libreville.

Le trajet par Bitam, Sam et Médouneu, fait environ
587 km et on a mis pas loin de 14h30. On s'est arrêté à plusieurs reprises et on a perdu du temps, la nuit pour le passage des ponts détruits. L'incertitude au passage du premier pont, nous a fait perdre beaucoup de temps. On a recherché des solutions, on a hésité, pesé le pour et le contre et examiné tous les alentours, y compris le lit et la profondeur de la rivière.

Le trajet retour par Bitam , rallonge de 70km et de 1h, mais en passant par Médouneu on met à peu près le même temps. Si on avait pris la piste Minvoul / Oyem, comme au départ, le trajet aurait fait seulement 510 km, soit
140 km de moins environ. Mais si la longueur des trajets est largement différente (70 km d'écart), le temps de conduite devrait être sensiblement égal. Passer par la piste Oyem / Minvoul, sans passer par Bitam, peut faire gagner 70 km de mieux et environ 1h de conduite en moins.

La piste est incontestablement très agréable de par la végétation et les paysages traversés.

Libreville / Ndjolé / Oyem / Minvoul par la route goudronnée : 650 km, 13h30.
Libreville / Kougouleu / Médouneu / Sam / Oyem / Bitam / Minvoul : 587 km, environ 14h30.
Libreville / Kougouleu / Médouneu / Sam / Oyem / Minvoul : 517 km, 13h30. Perte de temps avec les ponts cassés.


-
BITOUGA-Minvoul-Motel-Akoulou-Chargement-de-la-Voiture-14E5K3IMG_97598wtmk-web
L'Arrivée à Minvoul :
• La piste que nous avons emprunté après Oyem, va directement sur Minvoul. Toutefois, on arrive, après une centaine de kilomètres, à un carrefour, où sur la gauche, part la piste de Bitam. En prenant sur la droite, aucune erreur possible, on atteint Minvoul, après 9 kilomètres environ. J'avais pris, depuis plusieurs jours avec notre contact au village de Bitouga, M. Jean-Marie, qui nous avait donné un contact à Minvoul. Cette personne que nous rencontrons vers le 21h du soir, sera notre guide : c'est Antony. Jeune homme de la ville, il connait parfaitement le circuit pour aller au village. Ici, la majorité des gens sont des Fangs. On trouve des ouest-africains, bien entendu, et des camerounais.

Minvoul, petite ville nichée dans les collines avoisinantes au Cameroun, est un endroit éloigné de tout. La piste s'arrête ici. A l'est, ce n'est que la forêt. On trouve encore un petit bout de piste qui va jusqu'au village pygmée de DOUMASSI, qui est seulement à quelques kilomètres. Puis, plus rien. La forêt et encore la forêt. Étrange sentiment, que celui de se sentir au bout extrême du pays, loin de tout. Ici, la présence des camerounais et la proximité de la frontière se fait sentir. On trouve beaucoup de “moto-taxi“.

Dans la ville, on trouve, en 2014, 3 motels, dont le plus central est le Motel AKOULOU. Nous aurons la chance d'y trouver 2 chambres de libre. Une climatisée qu'a pris Stéphane, et une ventilée, dans laquelle j'ai dormi. Chose étonnante, mais aussi agréable, il y avait de l'eau dans les robinets. Pas de coupure d'eau ce jour. Mais la présence de nombreux seaux plein d'eau à terre, ne laisse aucun doute sur la fréquence des coupures d'eau. Elles existent. En attendant, ce jour, nous avons eu de l'eau, et, cerise sur le gâteau, de l'eau chaude. Le rêve.


- La Marche vers le Village de BITOUGA :
BITOUGA-le-Village-Cuisine-Toit-Fumant-14E5K3IMG_98096wtmk-web
• Le matin, nous avions donné rendez-vous au motel, à Antony. Nous devons le rappeler. Puis nous commençons notre périple dans le village à la recherche de son collègue qui devait nous accompagner au village. Nous passons plus d'une demi-heure à tourner, pour finalement le découvrir assis avec des amis. Son état second, son élocution douteuse et saccadée et ses yeux rouges ne peuvent mentir : la nuit a été dure, arrosée et il n'est pas du tout apte à nous accompagner ! Nous partons donc à la recherche d'une autre aide. Nous la trouvons, ou plutôt Antony la trouve, en la personne d'un jeune qui nous suit.
D'un petit carrefour, un panneau marqué “Projet de Développement Intégré en milieu Pygmée / Village de Bitouga“ nous indique que nous sommes sur la bonne voie. On passe devant la maison d'Antony puis nous continuons la route goudronnée qui s'arrête très vite, à 500 mètres. Puis la piste, au milieu des herbes hautes nous permet d'atteindre le haut de la colline. Cette piste, ou plutôt ce sentier est une trouée laissée par les piétons qui vont au débarcadère. Il est très étroit et bordé de hautes herbes qui nous dépassent. Nous hommes même inquiets et nous demandons confirmation à Antony, si on peut réellement passer en voiture. Bien que nous ayons un véhicule tout-terrain 4x4 TOYOTA BZJ 78, on redoute un piège caché, un trou, un effondrement du côté de la piste, ou tout simplement de se mettre dans une situation qui nous ferait perdre beaucoup de temps. Mais sa réponse est formelle, il est déjà passé en voiture par là. Donc nous continuons. Nous arrivons, après 1,5 à 2km, en haut d'une colline, et nous nous arrêtons. Nous déchargeons le matériel, c'est-à-dire nos sacs, avec affaires personnelles, nourriture, eau, appareils photo et autre. Puis Stéphane repart avec Antony pour laisser la voiture chez lui, afin qu'elle soit surveillée. Je reste seul avec le jeune aide. On attend. C'est long, 15 minutes, puis 20, 25. En discutant avec le jeune, je lui dit que nous allons dormir au village. Là, sa somnolence se coupe, pour me dire qu'il ne peut plus nous accompagner. Autre problème. malgré l'argent promis, rien n'y fait.
On attend encore, puis Stéphane arrive sur une moto-taxi, suivi de Antony sur une autre moto-taxi. Lorsque je donne les dernières informations à Antony, il essaye de convaincre le jeune, mais rien n'y fait. Finalement, nous allons nous répartir les charges, chacun portant plusieurs sacs et bouteilles pour commencer la marche.
Notre marche débute sur un sentier qui traverse plantations, forêt et arbres abattus. Sur environ 3,2 km, nous allons marcher pendant environ 1h 15'. On descend à flanc de colline, puis on remonte, puis on redescend et nous finissons par une pente abrupte qui nous amène au débarcadère. La marche n'est pas difficile, mais avec toute sels charges, le poids nous handicape. Le débarcadère est un petit espace de seulement une dizaine de mètres, qui tombe en pente assez raid dans l'eau. Un peu plus loin, il y a une trouée qui s'élargit entre des branches qui obscurcissent la vision, et des troncs en travers de la sortie. Aucune difficulté, mais une vision proche seulement. Beaucoup de végétation sur les côtés.

BITOUGA-le-Fleuve-Ntem-Palmier-Raphia-regalis-sur-la-Berge-14E5K3IMG_97681wtmk-Web



- La Traversée de la NTEM :

• Antony va chercher la pirogue qui est amarrée un peu plus loin, par une chaîne. En prévision de notre arrivée au village, le responsable a fait amener une pirogue, qui va nous servir au transfert. Elle ne fait pas plus de 3,50 m de long. Avec les bagages, on ne peut pas tenir tous les 3. Je monte donc dans la pirogue, je place mes 2 sacs devant, et Antony se met à la pagaie derrière. Elle est basse sur l'eau, et il n'est pas question de faire des mouvements brusques, ou alors, c'est la baignade. Il fera un deuxième tour pour ramener Stéphane. Mes affaires sont dans un sac étanche bleu, hermétiquement fermé. On ne sait jamais !

La pirogue avance lentement au rythme des coups de pagaie de Antony. Un dernier regard vers la terre ferme où je laisse mon ami Stéph, un passage sous des troncs coupés en baissant la tête, et puis après une trentaine de mètres, nous entrons sur le fleuve NTEM. Beau fleuve aux eaux noires. En fait, comme sur l'Ivindo, l'eau est de couleur orange très sombre du fait de l'importance des alluvions charriés. Mais avec la profondeur cette couleur vire au noir, d'où le nom “eaux noires“. Les berges sont occupées par des énormes palmiers raphia regalis, dont les branches tombent en arabesques vers l'eau. Ils prolifèrent par touffes juxtaposées, les unes après les autres. Le fleuve n'est pas très large, peut-être une cinquantaine de mètres seulement. Les eaux sont calmes. Antony alterne la pagaie avec la main droite puis la main gauche, pour suivre une ligne sensiblement droite. 2 à 3 coups de pagaie sur la droite, la même chose sur la gauche, puis le cycle recommence.
Nous naviguons sur la côté gauche du fleuve. La visibilité porte au moins sur 5 à 600 mètres, avant de suivre un méandre. La végétation reste sensiblement la même. C'est un spectacle magnifique. De temps en temps, un ou deux oiseaux décampent à notre passage. J'ai reconnu 2 Calaos en vol. Au bout de 1 kilomètre environ, nous obliquons sur la droite et sans que rien ne le laisse deviner, une trouée dans la végétation nous laisse passer.

BITOUGA-le-Retour-le-Fleuve-Ntem-Palmier-Raphia-regalis-sur-la-Berge-14E5K3IMG_98539wtmk-web
On pénètre alors dans une forêt inondée extraordinaire. On passe soudain dans un autre monde. Enfoui au plus profond d'un monde majestueux comme des fourmis dans leurs fourmilière, nous traversons la voute qui obscurci le ciel au-dessus de nous. Les troncs émergent de l'eau. Le fleuve, en cette saison des pluies, inonde comme à son habitude toute cette zone. En saison sèche, c'est vers un autre débarcadère plus loin, que nous devons aller. Mais aujourd'hui, le niveau est tel, que la pirogue n'a aucun mal à passer. On louvoie à travers les troncs, on se baisse pour passer sous un arbre déraciné. Par endroit ion devine la terre qui est présente. Mais pas longtemps. L'eau regagne du terrain immédiatement. Le silence. La pirogue qui file lentement au fil de l'eau. Les bruits de la forêt. Avancer à la pagaie, nous fait pénétrer dans ce monde fantasmagorique où les arbres deviennent des géants, la terre, une île perdue au milieu de cette contrée étrange, le ciel, une lueur immatérielle au-dessus de nous, les cris des oiseaux, un chant d'accueil et de bienvenue.

Quelques 15 à 20 minutes plus tard, la pirogue se stabilise lentement à terre. C'est le débarcadère. On décharge rapidement le matériel et Antony repart en sens inverse pour ramener Stéphane. J'en profite pour me promener en forêt où je prends en photo des plantes, des lianes, des insectes. J'attends et j'attends. Puis, peut-être 40 minutes ou 1 heure plus tard, Antony arrive en pirogue avec Stéphane.


BITOUGA-le-Village-Case-du-Chef-14E5K3IMG_97970wtmk-web
- Le Village de BITOUGA :
• Après avoir repris nos sacs et répartis les charges, nous empruntons le sentier, qui va nous conduire vers le village de Bitouga. Il n'est pas très loin. Peut-être 1 petit kilomètre, 15 à 20 minutes de marche. Le sentier passe à travers des plantations puis débouche sur le village. Une vingtaine de cases, une centaine de personnes, en réalité peut-être 80 seulement, dont beaucoup d'enfants, vivent dans ce village. Les cases sont en banco. Un treillis de branches séchées sur lequel on a appliqué de la boue, qui, après séchage, constitue des murs isolants.

Nous allons voir notre contact, Jean-Marie, d'origine camerounaise, mais qui est le chef du village. Le drapeau tricolore Vert / Jaune / Bleu nous indique sa présence. Il nous reçoit très aimablement et nous fait assoir dans son échoppe. Nous passons un moment avec lui, et nous devenons vite l'attraction du moment.

Notre but, notre présence ici, était de nous rapprocher de cette civilisation pygmée et de nous immerger un peu dans leur monde. Jean-Marie est notre intermédiaire. On lui demande un endroit pour mettre notre tente. Il nous propose alors, de dormir dans des chambres de passage, dans le prolongement de sa case. Nous mettons donc nos affaires dans nos chambres. Nous n'avons pas besoin de monter nos tentes. Par contre, je prépare ma moustiquaire, en remplacement de celle existante, dont les trous ne laissent aucun doute sur son efficacité. Puis nous allons manger un peu. Il est aux alentours de 13h. En allant dans le village nous rencontrons une grande partie de la population avec qui nous communiquons.


- La Construction des Huttes Traditionnelles :
BITOUGA-le-Village-Hutte-Traditionnelle-Pygmee-14E5K3IMG_98024wtmk-web
• Nous avions demandé à Jean-Marie, de nous mettre en contact avec des personnes pouvant nous construire 2 huttes traditionnelles. Nous les rencontrons. Elles nous accueillent dans leur langue locale : Modzoukoué, Bonjour, auquel on doit répondre Madzoukoué. Des hommes sont allés en forêt dès le matin, pour rechercher des branches qu'ils appellent LO. Les femmes, quand à elles, sont parties à la recherche des feuilles, qu'elles appellent NGONGO. Ce sont ces grandes feuilles de marantacées, utilisées sur les marchés du pays. 4 petites femmes âgées vont commencer, sous notre regard, la construction des huttes.
D'abord elles trient les branches, en sélectionnant les plus longues et les plus flexibles. Elles les plantent en terre, en poussant sur la branche. En partant de chaque côté de la hutte, qui va faire presque 3 mètres de large, les branches s'entrecroisent en haut. Puis on continue à planter d'autres branches en cercle, pour donner corps à la hutte. Toutes se rejoignent en haut en s'entremêlent. Le châssis prend forme. Un squelette de hutte se voit maintenant. L'entrée est Faite par une branche en demi-cercle, sur laquelle viennent se coller les autres. Pour rentrer, il faudra s'accroupir. En moins de 2 heures, l'ossature est finie. Les jeunes filles regardent et participent mollement. Ce travail, exclusivement celui des femmes chez les pygmées, est un savoir-faire qui se perd lentement. Les jeunes, en allant à l'école, ont perdu tout lien avec cette culture ancestrale.
Dans la culture pygmée, la cuisine et la confection des huttes est le domaine des femmes. La chasse est le domaine des hommes.

Une vieille femme aux mains rongées vraisemblablement par la lèpre, prépare les feuilles. Ce sont des
marantacées à larges feuilles, que tout le monde utilise, du nord au sud du Gabon. Après avoir moulé la hutte, d'autres femmes commencent à glisser les feuilles. En partant du bas vers le haut, les premières posées sont recouvertes successivement par les autres. Cette imbrication complexe et méticuleuse ressemble à s'y méprendre à un revêtement de tuiles. Les doigts experts, forgent une carapace. Petit à petit la hutte prend forme. Après environ 4 heures de travail, la hutte est totalement finie.

BITOUGA-le-Village-Construction-Hutte-Traditionnelle-Pygmee-et-JLA-14E5K3IMG_97935wtmk-web
Un peu plus tard dans l'après-midi, un orage va subvenir. J'en profiterai pour rester sous la hutte et en vérifier ses capacités. Malgré la pluie qui va tomber dru, comme seul on peut la voir tomber lors d'un orage tropical, aucune goutte ne pas passer à l'intérieur. Quelle belle construction ! Je vais rester dessous près de 1 heure, en attendant que l'orage finisse. Parfait.
En faisant le tour du village, je vais rencontrer une personne qui est là pour quelques semaines, et qui vit dans une hutte faite il y a 2 ou 3 mois. Alors que notre hutte est d'un beau vert tendre, celle de notre relation, est complètement desséchée. Toute la hutte est d'un gris-marron ancien, délavé, de la couleur de feuilles séchées. C'est tout à fait normal puisque cette hutte a plusieurs semaines. Par contre, elle abrite, comme n'importe quelle chambre, tous les objets de la vie courante : matelas, drap, réchaud pour la cuisine, ustensiles de cuisine, vêtements, petite table, etc… Cette hutte est vivante. Elle vit, elle fonctionne, elle abrite, elle offre un refuge, une cuisine, une chambre, un rangement. Comme une habitation en dur, cette hutte est une maison. Notre relation nous montre fièrement son logement. Construction rapide et efficace. Après la pluie, il est ressorti sans problème, sans un endroit mouillé.


- Le “NZANGA BOUENZÉ“ ou le Sentier Nature :
• En poursuivant la visite du village, je reviens sur le sentier qui va vers le débarcadère, et je rencontre le tradi-praticien Alain Ndong. Sur le côte de la piste, un cadre de branche avec une tenture de raphia, délimite l'entrée d'un endroit sinon sacré, mais du moins mystérieux. C'est le NZANGA BOUENZÉ, ou le Sentier Nature. Sur l'arche d'entrée, des symboles. Ce sont les protections qui protègent tous ceux qui pénètrent sur ce sentier. Seulement ? Non ils protègent aussi le village. Si quelqu'un est animé de mauvaises intentions, le mal est réfléchi comme dans un miroir et retombe sur lui.

BITOUGA-le-Village-Nzanga-Bouenze-Alain-Invitant-a-Entrer-14E5K3IMG_98297wtmk-web
Alain le Tradi-praticien du village connait parfaitement toutes les plantes médicinales, les arbres, ceux dont on prend l'écorce pour tel mal, ou les feuilles pour tel autre mal, les herbes, les feuilles , les tubercules, ceux qu'on prend en tisane, qu'on applique sur les parties malades ou ceux qu'on mange. Ce médecin possède incontestablement un savoir-faire important. Sa science et ses connaissances étendues, lui permettent de gagner la confiance des gens et d'étendre sa médecine bien au-delà du village. Beaucoup de gens actuellement au village ne sont pas des pygmées. Ce sont des gens de passage pour quelques jours ou semaines, pour se faire soigner par ce médecin spécial.

Il m'invite à passer sous un autre porche de raphia, qui petit à petit m'amène au mildi de la forêt, dans un endroit dégagé : c'est son cabinet de consultation et son hôpital. Par terre, des troncs pour s'assoir, des cadres délimités par d'autres troncs pour les “bains“, d'autres endroits pour … seul lui en connait l'essence. Des arbres, des symboles, des espaces réservés, des chemins … Un sentier qui doit se prolonge sur un kilomètre peut-être. C'est son espace, son laboratoire, son cabinet de consultation et de travail, peut-être son hôpital. Ce Nzanga Bouenzé peut se traduire par le “Sentier Nature“. C'est son espace. C'est lui qui domine, non, c'est lui qui se sert de la nature pour apporter le bien aux autres. Son savoir a dépassé les frontières du village.
Des gens font des kilomètres pour se faire soigner par ce Médecin ? Ce Tradi-Praticien ? Ce Sorcier ? Difficile à dire. Peut-être un peu de tout cela. Médecin et sorcier à la fois. Science et mysticisme aussi. Savoirs et secrets. Nature et esprits. Ici la science rejoint l'immatériel.


- La Danse EKOLO :
• Le soir, la communauté pygmée a organisé une danse qu'ils appellent EKOLO. Cette danse de retrait de deuil, mais aujourd'hui seulement pour nous, est réservée aux femmes qui chantent. Les hommes dansent. Autour du feu, en ce vendredi soir, toute la collectivité s'est réunie pour cette soirée. Un grand feu est allumé au milieu de la place principale, vaste zone de plus de 40 à 50 mètres de large. Derrière le foyer, sur la gauche, se trouvent une partie des femmes assises sur un banc et sur des chaises. Ce sont elles qui chantent. Autour du feu des hommes, jeunes et très jeunes, dansent. Quelques jeunes filles aussi vont se mêler à la danse. Sur la droite, d'autres hommes donnent le rythme. Le
NGOMBE (sorte de tram-tam) est joué par un maître local. Pour la préparation il a fallu tendre la peau, ce qui a pris peut-être une demi-heure. Deux ou trois jeunes tapent avec des baguettes sur un long bois étendu par terre, c'est le MBANDA.
Bitouga-le-Village-la-Danse-EKOTO-SB14DSC1002966wtmk-web
Autour du feu le danseur principal porte un pagne équipé d'un instrument appelé ANGUISSA. Cet instrument qui ressemble à 2 ou 3 clochettes produisant un son de basse fréquence, est porté autour de la taille avec un pagne de raphia. Le mouvement du corps, entraîne une rythmique synchronisée avec les mouvements du corps.

L'alcool et la musique vont occuper tout l'espace de temps de cette nuit. Nous, Stéphane et moi, irons nous coucher, bien avant l'ensemble de nos hôtes. Mais un gros orage vers 1 h du matin, mettra tout le monde d'accord. La fête sera finie.
Le lendemain, nous nous lèverons aux premières lueurs. Nous avions préparé avec Antony le soir, notre départ. Nous avons demandé une deuxième pirogue, avec une personne pour nous accompagner sur le retour. 2 pirogues et 2 piroguiers. Tout cela afin de ne faire qu'un voyage.
La traversée de la forêt inondée, la descente du fleuve NTEM puis la marche entre le débarcadère et l'endroit de déchargement. Nous avions téléphoné aux motos-taxis pour gagner un peu de temps au retour. Malheureusement nous les attendrons en vain. On décidera donc de charger les sacs et nous ferons le trajet à pied jusqu'au “garage“ où nous avons laissé notre véhicule, c'est-à-dire la case d'Antony. Au passage nous croiserons les motos-taxis en difficulté. En fait la pluie a rendu le sentier boueux et glissant et les motos n'arrivaient pas à monter. Nous ferons les 4 km à pieds, avec les sacs. Leur poids avaient diminué, car il y avait la nourriture en moins.
Nous avons dédommagé la gardienne de la voiture, le piroguier qui nous a ramené et accompagné jusqu'au lieu de départ.

Pour le retour, nous passerons par Bitam et puis nous prendrons la piste par Médouneu. D'autre péripéties, que j'ai rapporté plus haut.

Bitouga-Pano-1awtmk-Web











Les Pygmées de BITOUGA / Jean-Louis ALBERT / Mai 2014.


______________________________________________________________________________________________________________